Mots, images, présentation



Dans 'Le pouvoir', on a commencé avec cette phrase que 'L'abus de pouvoir l'annule. Car lorsqu'on va à l'encontre des intérêts d'un individu, d'une entreprise ou d'une nation, on va forcément à l'encontre de son propre pouvoir.' Je n'ai pas changé d'avis.

On a déjà fait allusion au sujet pesant du pouvoir de la presse en évoquant la citation d'Oscar Wilde à propos des média dans son 'The  soul of man under socialism' : 'Somebody- was it Burke?- called Journalisme the fourth estate. That was true at one time, no doubt. But at the present moment it really is the only estate. It has eaten up the other three (...). We are dominated by Journalism'.
Wilde fait donc une allusion à Burke qui regardait alors le journalisme comme le quatrième Etat '(...) c'était vrai sans doute à l'époque, mais au moment actuel c'est l'unique Etat. Il a mangé les trois autres. (...). Nous sommes dominés par le journalisme.'
Si même lui a pu constater la puissance des média à son époque, assez même pour pouvoir formuler une telle ironie, imaginez ce qu'il aurait pensé du pouvoir et de l'abus de pouvoir du journalisme aujourd'hui.

De nos jours les moyens extraordinairement rapides et efficaces de communications internationales rendent énorme la responsabilité des média. Mais la tentation d'influencer le public selon une tendance politique de certains média est manifestement trop forte pour ne pas être pratiquée. Le public donc est ainsi orienté aussi selon ses propres inclinations socio-politiques.

Les responsables d'un journal pourraient beau prétendre être impartiaux en essayant sincèrement de maintenir la pratique de ce principe, mais invariablement ils suivent la direction déterminée par ce qu'ils estiment être leurs propres intérêts, parfois jusqu'au point où les conséquences peuvent révéler qu'ils ont commis une erreur, parfois fatale, de jugement.

On a vu ceci avec certains journaux particuliers français qui ont joué un rôle trop important en dénigrant N. Sarkozy et en promouvant et lançant F. Hollande en même temps. Comme le vent a changé depuis, les média concernés s'adaptent naturellement selon les conséquences. D'ailleurs un certain journal français ainsi que son directeur écharpé qui prétendent pratiquer l'impartialité souffrent manifestement des répercussions d'un comportement partisan préélectoral un peu trop zélé.

A une époque, on aimait lire 'V. A'. A cause d'un changement de direction ce mensuel honorable avait remarquablement changé, et a probablement fait fuir alors beaucoup de ses lecteurs fidèles. Depuis le mensuel s'est bien rattrapé, sans doute à cause d'un autre changement de direction, n'empêche que le mal a été fait.
De tels changements de priorité, surtout d'orientation politique, peuvent amener aux conséquences assez négatives pour des gérants des journaux tentés de se faire valoir ou de suivre leurs intérêts personnels au détriment de la ligne et la réputation établies des journaux pour lesquels ils sont responsables.

On voit aussi à quel point certains journaux anglais de haute réputation, digne de tous les principes de bon journalisme depuis des lustres, ont été plombés au niveau des tabloïds médiocres par les soins mercenaires et cyniques de Rupert Murdoch. On a aussi vu comment ses journalistes fonctionnent avec peu de respect pour le code moral journalistique.

Dans 'Vérités belges' on a pu constater l'engouement de certains journalistes parisiens après avoir obtenu le privilège de faire partie du cortège auguste de F. Hollande. En plus à cette époque il n'était qu'un candidat aux présidentielles. Déjà alors on se posait des questions à son sujet.

Les socialistes français se réfèrent souvent aux valeurs nées de la Révolution fin 18°. Ils aiment faire mine de s'identifier avec les pauvres, les sans-culottes acharnés à se débarrasser de la monarchie, des riches aristocrates, et des fortunés qui ont pu réussir grâce à leurs propres initiatives et efforts individuels. Ce peuple influencé voire manipulé par l'exécutif a été dupé à croire dans la liberté, la fraternité et surtout l'égalité. Mais l'intelligentsia qui croyait d'abord aussi dans cette Révolution inéluctable, ceux comme Hugo, par exemple, virent la misère qui en fut finalement le produit. C'est aussi à cause de cette réalité vue par lui comme par tant d'autres personnes dotées d'esprit, qu'ils ont carrément modifié leurs opinions sur le bien fondé de la Révolution.

Puis pour retourner à nos jours, pourquoi tant de zèle médiatique pour se débarrasser d'un bon choix le substituant avec un mauvais choix? Ce dernier apporterait-il aux intéressés des récompenses? Tandis que le bon choix n'aurait-il rien apporté et n'aurait-il rien promis à personne, préférant sa liberté d'arbitre, sa liberté de gouverner selon ses propres convictions?

Voici donc encore une ironie de l'histoire. Ceux qui louent les bienfaits de la naissance de la République, ces robespierres convaincus qu'il a fallu à tout prix éliminer la monarchie pour la cause de la Révolution et de la République, ce sont surtout eux qui en quelque sorte ont remplacé la monarchie sinon l'absolutisme par un comportement arrogant et tranchant, en imposant leur volonté, sans trop d'égard pour les principes de la démocratie. Certes un Président n'est pas un Roi, mais ce ne sont que des mots. Monsieur Hollande se comporte comme un Roi, un mauvais Roi, un autocrate. Son cortège consiste en des journalistes sans scrupules, suivis par des opportunistes qui savent comment faire plaisir au Roi pour se procurer sa faveur. Puis viennent des dupes qui croient qu'égalité signifie que le patronat doit partager sa richesse avec ses salariés. Un tel cortège du Roi serait quasi infini, car même si le Roi n'a pas de moyens pour continuer à faire plaisir, ou qu'il ne veut pas aller outre mesure pour 'anoblir' ses acolytes, il peut toujours continuer à promettre la lune.

Un autre paradoxe historique, même si on ne peut pas le considérer tout à fait comme un parallèle avec l'ironie française, est celui des Etats Unis. Comment les democrats sont devenus un mouvement de gauche quand originalement ils représentaient un peuple plus conservateur de tous. Ne défendaient-ils leur confédération au sud, leur manière privilégiée de vivre grâce au servitude, donc sans égard pour la liberté des autres, tandis que les Republicans représentaient justement la liberté sinon 'la fraternité' et 'l'égalité'? Par définition ce sont ces derniers qui ont gagné leur liberté du 'joug' de la Monarchie britannique. Ce sont eux qui ont fondé et défendu la République. Si c'est vrai, curieusement en quelque sorte les rôles et les valeurs socio-politiques semblent avoir été inversés avec le temps.
Au sujet du code de conduite journalistique, j'ai aussi fait allusion à la liberté de la Presse Américaine. Mais l'enjeu de la concurrence, d'être le premier informateur d'un sujet de taille, même si un tel sujet peut mettre en danger la vie des autres, sinon représenter une menace pour l'Etat même, est loin d'être uniquement pratiqué aux Etats Unis.

Assez récemment, à tort ou à raison, un certain journal français a pris la liberté de se comporter quasi comme juge, jury et justicier. Tellement convaincu du bien fondé de son argument, il a carrément accusé un élu de détournement de fonds.
Comme cette accusation a été publiée un peu trop près des élections municipales, naturellement elle suscite des soupçons de partisanisme, car dans le climat actuel, et selon les insinuations de Monsieur Cahuzac, (l'ancien ministre de l'Economie honni pour avoir eu une compte bancaire important en Suisse, et depuis, de façon intrigante, est devenu sagement silencieux) si un journal veut avoir l'air moral et fortement impartial, respectant ainsi le principe l'égalité, c'est quasi certain qu'il y a de quoi pour publier des articles de choix sur des personnes de tous bords politiques ad infinitum.

Même si un journal est persuadé en toute bonne conscience qu'une telle initiative soit justifiée, elle peut provoquer plus de mal au journal que l'on s'imagine. Car le public bien avisé cherche constamment des sources d'informations sûres et en principe impartiales. Il a besoin d'une référence valable d'information constamment digne de confiance.

C'est un peu comme d'avoir l'habitude de manger chez un certain restaurant car c'est toujours bon, et un beau jour au lieu d'offrir les plats que l'on a toujours appréciés, on nous sert des petits plats artistiques, prétentieux et parcimonieux, et voilà, c'est fini, on n'y retournera plus.

A l'approche des élections municipales, on voit de plus en plus clairement comment certains journaux prétendus impartiaux veulent influencer le vote public. Et manifestement cette ingérence partisane n'est pas limité aux journaux. Les déclarations à propos des derniers scandales de certains politiciens et élus de toutes tendances comprises révèlent leur clanisme ou leurs ambitions personnelles de manière assez grotesque. Un ministre socialiste peut même contredire le secrétaire général du parti socialiste sur un tel sujet, ce qui ne serait pas trop difficile. Ou un élu de l'opposition peut contredire un autre de la même manière. Un désordre même de tendance politique jamais vu, semble être en train de se développer.

En conclusion, qui est responsable lorsqu'il y a une augmentation d'abus de pouvoir de la presse, de la manipulation des mots et des images pour promouvoir ou dénigrer une personne ou un parti politique? Les gérants des journaux ainsi engagés? Oui, mais pas autant que le premier responsable. Le premier responsable c'est évidemment 'le Roi' lui-même, car sans lui il n'y aurait aucun intérêt. C'est lui le distributeur des faveurs royales, jusqu'à mener certains apôtres de la presse par le bout du nez en tant que membres de son cortège, des petits ambitieux politiquement corrects.

Tous moyens sont bons pour faire durer le règne du socialisme, et d'autant plus lorsque le règne n'est autrement qu'une catastrophe économique. Le soutien des média est essentiel. L'exploitation de l'Education Nationale en serait davantage, pourvu que le temps la permette, car c'est aussi un moyen d'informer, ou plutôt de réformer, voire formater, en ôtant l'influence de la famille selon le programme, et enseignant en priorité ce qui est politiquement, socialement et 'laïquement' correct.

Mais tout est relatif. Malgré le matraquage médiatique, le lecteur a toujours le choix. Il est mieux informé que jamais donc moins naïf. Si un journal change pour le pire, s'il transgresse son propre code de pratique, piétine sur ses principes, traverse ses propres limites établies, ou si jamais le pouvoir monte trop à la tête de son gérant, il va sans dire qu'un tel journal peut perdre sa crédibilité, puis ensuite beaucoup de lecteurs et de clients d'un seul coup.
Une telle erreur pourrait donc être fatale, et les énormes conséquences financières et sociales engendrées aujourd'hui, par rapport à celles relativement plus modestes provoquées par une telle erreur de jugement journalistique à l'époque d'Oscar Wilde, parleraient bien évidemment pour elles mêmes.
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Text © Mirino. Top image: page from the Gutenberg Press, 1450 (part of a folio of antique lettering purchased in Amsterdam).                        March, 2014                                                            

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